Il fait nuit

Je vais comme une rumeur

Qui prend feu de bouche en bouche,

Sans me brûler, plus charmeur

Que charmant ; si je te touche,

Ne t'attends pas à me voir

M'enraciner dans ta couche !

Je deviens un slalomeur

Si des cœurs d'artichaut tentent

De m'accorder la primeur

De leurs âtres ; qu'ils s'aimantent

Entre eux ! Je crains de devoir

Faire en sorte qu'ils déchantent.

J'apparais souvent d'humeur

À me plier plus qu'en quatre

Pour secouer mon chômeur

De cœur, mais voilà que battre

N'est plus chose à concevoir

Depuis qu'il est dans un plâtre ;

Depuis qu'on me l'a cassé,

Il fuit l'odeur de l'essence.

Au chaud, bien cadenassé,

Il reste en convalescence.

Peut-être qu'un cœur ne meurt

Qu'en phénix, et que l'aurore

Ramènera le semeur

De bonheur qui fait éclore

La fleur d'amour, va savoir...

Pour l'heure, il fait nuit encore.

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